Un rare masque en ivoire du Benin, qui a refait surface en novembre dernier comme l’un des tresors de la collection Al-Thani a Paris, a ete retire d’une vente aux encheres a Londres il y a un peu plus d’une decennie a la suite d’une controverse sur son statut.

Le masque en ivoire du Benin, l’un des cinq seuls exemplaires connus de ce type, devait etre mis aux encheres chez Sotheby’s en fevrier 2011, avec une estimation de 3,5 a 4,5 millions de livres sterling. Mais quelques jours apres avoir annonce la vente, la maison de vente aux encheres l’a annulee, declarant a l’epoque qu’elle l’avait fait « a la demande des expediteurs [du masque] ».

Les expediteurs en question etaient des descendants de Sir Henry Lionel Galway, un officier superieur colonial au Nigeria qui a pris part a l’expedition punitive britannique de 1897. Cette incursion de 1 200 soldats britanniques a capture et saccage Benin City (situe dans le Nigeria moderne), volant des milliers de artefacts, qui ont ete emmenes en Grande-Bretagne et finalement disperses dans des musees et des collections du monde entier.

Bien qu’aucune revendication formelle n’ait ete faite sur le masque en ivoire avant la vente aux encheres de Sotheby’s en 2011, les protestations appelant au retour des objets beninois au Nigeria avaient commence a s’intensifier.

Le president nigerian de l’epoque, Goodluck Jonathan, aurait pris un interet personnel a l’affaire, tandis qu’Orobosa Omo-Ojo, un responsable du gouvernement de l’Etat d’Edo, qui contient la ville moderne de Benin, a declare que Sotheby’s devrait « s’abstenir de vendre le masque. Tout ce qui les fera ignorer cet appel du gouvernement de l’Etat d’Edo nous incitera a l’utiliser comme point de depart pour proteger nos proprietes intellectuelles », selon un rapport publie dans la Gazette du commerce des antiquites . Apres avoir annule la vente du masque en ivoire, Sotheby’s l’a rendu ainsi que cinq autres objets beninois a la famille qui les avait consignes.

La maison de vente aux encheres affirme qu’elle n’a pas ete impliquee dans la vente ulterieure du masque au cheikh Hamad bin Abdullah Al Thani, membre de la famille royale du Qatar, dont la vaste collection d’antiquites, de bijoux et d’ouvres d’art a ete exposee a l’Hotel de Paris. de la Marine en novembre dernier.

Un porte-parole de la collection Al-Thani a declare qu' »aucun avis de reclamation [sur le masque en ivoire] n’a ete recu » et qu’elle est « ouverte a l’exploration de partenariats culturels, d’echanges d’expositions et de manieres collaboratives d’exposer cet objet ». au Nigeria », ajoutant qu’il est « honore d’avoir presente ce chef-d’ouvre pour la premiere fois en 70 ans dans son espace museal a l’Hotel de la Marine ou il a ete un moment fort d’une exposition qui a reuni des objets exceptionnels de diverses civilisations et periodes… celebrant les grandes cultures du monde entier ».

Ces dernieres annees, la pression publique croissante pour la restitution des objets beninois pilles a incite de nombreux musees a les restituer volontairement. Cependant, aucun musee nigerian ne possede actuellement de masque en ivoire du Benin dans sa collection. Il existe quatre autres exemples connus en plus de celui de Paris. Ceux-ci sont situes au British Museum de Londres; le Musee Linden, Stuttgart; le Seattle Art Museum et le Metropolitan Museum of Art de New York.

La collection qatarienne fait actuellement l’objet d’un examen minutieux, selon le journal francais Le Monde, qui a fait etat de preoccupations plus larges concernant la provenance et l’authenticite d’ouvres de Syrie, d’Egypte et du Yemen, avec des suggestions selon lesquelles certaines pourraient avoir ete excavees illegalement de leur pays d’origine respectifs.

La collection Al-Thani affirme avoir acquis ces ouvres aupres de revendeurs etablis, consulte des experts independants a leur sujet et suivi les directives de diligence raisonnable standard lors de leur achat. Il a restitue des ouvres pour lesquelles il y avait des problemes d’authenticite et enquete sur les problemes de provenance par rapport a une autre ouvre, declarant dans un communique: « La collection traite toute allegation de ce type avec beaucoup de serieux ; il entreprend activement des recherches supplementaires et s’engage a mener une enquete approfondie pour evaluer les problemes souleves.