Dans Le Prestige de Christopher Nolan , on suit la vie de deux magiciens Robert Angier et Alfred Borden incarnes respectivement par Hugh Jackman et Christian Bale.
On nous les presente comme deux jeunes hommes qui veulent reussir dans le showbiz de la magie jusqu’a ce que quelque chose se passe terriblement mal, ce qui les fait devenir de redoutables rivaux l’un pour l’autre.
Cette competition impitoyable les rend tous les deux obsedes l’un par l’autre. Quel est le secret de l’autre ? Quelle est leur astuce? Peut-il etre depasse ? Inutile de dire que cette obsession n’est de bon augure pour aucun d’eux.
Le conseil le plus courant sur la concurrence est double : « la competition est pour les perdants » et « concurrencez votre passe ». Les deux sonnent bien mais ne sont pas toujours tres utiles. Laissez-moi elaborer.
Votre but ultime est de devenir un monopole et de sortir de la foire d’empoigne. C’est le sens du premier adage. Cela signifie essentiellement : ne jouez pas aux jeux des autres. Faites les choses differemment. Creez votre propre jeu.
C’est un bon conseil mais vous n’avez pas toujours le luxe de creer vos propres regles, surtout lorsque vous essayez seulement d’etre promu avant votre ami (rival).
Le deuxieme adage est d’avoir un etat d’esprit de croissance. La competition avec les autres peut etre stressante et degrader nos performances. Nous devrions plutot nous mesurer a notre passe et voir jusqu’ou nous sommes parvenus. Cela nous donnera certainement un sentiment d’accomplissement. Aussi, nous devrions nous mesurer a notre futur moi ideal. Cela nous donnera un sens du but.
Bien que ce soit un bon conseil de manuel, les etres humains ne sont pas cables de cette facon. Nous sommes des animaux sociaux. Bien que nous aimions aider ceux qui en ont besoin, nous aimons aussi concourir et gagner.
La concurrence nous donne un cadre pour nous mesurer aux autres. Il nous indique ou nous nous situons dans le monde, a quelle distance nous sommes en avance ou en retard par rapport a ceux qui nous ressemblent.
Ce sentiment de competitivite agit comme un facteur de stress qui motive les entreprises a innover, les athletes a battre des records, les investisseurs a gagner plus d’argent. La concurrence fait avancer l’humanite.
Mais, comme tous les facteurs de stress, une trop grande quantite est nocive.
Alors que la concurrence nous aide a nous mesurer aux autres, si nous nous mesurons – notre carriere, notre richesse, notre statut ou notre succes – uniquement par rapport aux autres, nous sommes en proie a un sentiment sans fin d’inadequation, d’incompetence et de pauvrete.
Les humains ont tendance a mieux s’en sortir avec des facteurs de stress aigus plutot qu’avec des facteurs de stress chroniques. Trop de competitivite se traduit par une obsession chronique qui n’est pas tres differente de l’intrigue de The Prestige . Ca ne finit jamais bien.
Il y aura toujours quelqu’un de plus intelligent, de plus chanceux, de plus populaire, de plus beau que vous. Si votre seul critere est la comparaison avec les autres, rien de ce que vous ferez ne sera jamais aussi bien.
L’obsession chronique mene a la depression chronique.
Nous avons besoin d’un sens de la competitivite, mais a la bonne dose. Trop peu et nous devenons flasques. Trop et nous ne nous sentons pas heureux ou epanouis.
Nous devrions etre motives par l’opportunite mais pas en proie au FOMO.
Lorsqu’un collegue obtient une promotion (qu’il ne merite pas), il est bon d’etre motive pour jouer le systeme a votre avantage, mais il est insense d’etre obsede par cela. Et la difference est tres subtile.
C’est a ce moment qu’avoir un critere interne devient pratique. Alors que vous mesurer au monde vous indique ou vous vous situez, vous mesurer a vos propres normes vous indique ce que vous devez faire a ce sujet.
Avez-vous vraiment besoin de cette promotion ou la voulez-vous simplement parce que votre collegue l’a obtenue ? Quel est le prix que vous devez payer pour cela? Vaut-il vraiment la peine de travailler 100 heures par semaine et de tirer le meilleur parti de votre potentiel de carriere?
Si vous vous debrouillez bien selon vos normes, vous n’avez vraiment rien a faire, meme si tout le monde autour de vous reussit mieux ou gagne plus d’argent.
Dans Le Prestige , Robert Angier et Alfred Borden avaient des traits opposes. Angier etait un showman tandis que Borden etait un artisan. Ils ont eu de nombreuses occasions de concourir et d’apprendre les uns des autres. Mais ils n’etaient obsedes que par battre l’autre. Il n’y avait pas de critere interne, seulement une competitivite extreme.
Une personne dont le sens de la competitivite est alle dans une overdrive est aveuglee par FOMO. Ils n’ont pas la vision peripherique pour avoir une vue d’ensemble et prendre des decisions strategiques. Peu importe a quel point ils sont bons, peu importe ce qu’ils accomplissent, ce ne sera jamais assez.
Le sens de la competitivite est inne en nous. Mais c’est une epee a double tranchant. Bien que cela puisse nous aider a grandir, une trop grande quantite peut egalement nous nuire. C’est un instinct animal. Nous ne pouvons pas dependre uniquement d’elle pour prendre des decisions. Nous devons l’equilibrer avec un critere interne – la supervision humaine necessaire pour controler l’animal en nous.