Lors de sa premiere rencontre face a face avec le president chinois Xi Jinping depuis qu’il est devenu president, le president Joe Biden a lance lundi un avertissement severe : Xi devait tenter de faire comprendre a son proche allie la Coree du Nord que le lancement d' »essais nucleaires a longue portee » etait inacceptable et que si Pyongyang ignorait Xi, les Etats-Unis prendraient certaines mesures « defensives » pour « envoyer un message clair a la Coree du Nord ».
Mais les avertissements ne suffisent pas. Pyongyang lance des missiles a un rythme sans precedent et exporterait des obus d’artillerie vers la Russie, et on pense qu’il se prepare a un septieme essai nucleaire. Les Etats-Unis devraient faire plus que deleguer la responsabilite de la repression a Xi, en particulier apres que Biden a admis qu’il n’etait pas clair si Pekin pouvait « controler la Coree du Nord ».
L’administration Biden doit prendre des mesures concretes maintenant – en particulier, retablir immediatement le regime de sanctions autrefois robuste qui s’est atrophie depuis que Donald Trump a adopte la diplomatie au sommet avec Kim en 2018.
Les Etats-Unis devraient egalement faire plus qu’attendre que le dirigeant nord-coreen Kim Jong Un s’intensifie davantage. Exactement ce que les mesures defensives evoquees par Biden sont floues, bien que la semaine derniere, le conseiller a la securite nationale de Biden, Jake Sullivan, ait declare : « Si la Coree du Nord continue sur cette voie, cela signifiera simplement une presence militaire et securitaire americaine renforcee dans la region.
Au lieu de cela, l’administration Biden doit prendre des mesures concretes maintenant – en particulier, retablir immediatement le regime de sanctions autrefois robuste qui s’est atrophie depuis que Donald Trump a adopte la diplomatie au sommet avec Kim en 2018, puis a perdu tout interet lorsqu’il est devenu clair que Kim n’avait aucune intention de desarmer.
Dans l’etat actuel des choses, certaines voix de la politique etrangere soutiennent que la lecon de l’echec de Trump et des presidents americains precedents a arreter le programme nucleaire nord-coreen est d’accepter la Coree du Nord comme puissance nucleaire.
Le mois dernier, Bonnie Jenkins, la sous-secretaire d’Etat au controle des armements et a la securite internationale, a suggere que l’administration Biden accueillerait favorablement des negociations sur le «controle des armements» avec la Coree du Nord, une formulation qui evoque des pourparlers avec l’Union sovietique qui acceptaient que chaque partie maintienne un arsenal nucleaire.
Ned Price, le porte-parole du departement d’Etat, a fermement rejete les commentaires de Jenkins a plusieurs reprises. C’est bien, mais pas assez. Dans la pratique, meme les pourparlers de desarmement ont abouti a des accords que Pyongyang repudie bientot.
Le president Bill Clinton a passe ses deux mandats engages dans des negociations, y compris un accord dans lequel Pyongyang etait cense reduire son programme nucleaire – seulement pour que le regime de Kim, alors dirige par Kim Jong Il, admette en 2002 qu’il developpait un uranium secret programme d’enrichissement qui a « annule » les restrictions convenues sous Clinton.
De meme, le president George W. Bush a passe la majeure partie de son second mandat a essayer de negocier et de mettre en ouvre un accord de desarmement. Bush a impose une pression financiere sur le regime de la famille Kim par le biais de sanctions americaines et plus tard d’une resolution du Conseil de securite de l’ONU qui a ete adoptee juste apres le premier essai nucleaire de Pyongyang en octobre 2006. Mais apres que la Coree du Nord a repris les negociations, il a reduit les sanctions en echange de promesses de denuclearisation, que Pyongyang a rapidement violee.
Le president Barack Obama a augmente les sanctions apres le deuxieme essai nucleaire de la Coree du Nord au cours de son premier mandat en 2009, mais n’a pas maintenu l’elan. Il a tente de relancer les negociations avec l’accord du Leap Day – et ces efforts ont ete de courte duree, car Pyongyang a lance un satellite utilisant la technologie des missiles balistiques peu apres la conclusion de l’accord.
Enfin, en 2016, l’administration Obama a intensifie les sanctions contre la Coree du Nord apres un essai nucleaire et un lancement de missile balistique qui a eu du mordant. Ils comprenaient des sanctions et une mise en accusation contre une entreprise chinoise et quatre Chinois qui ont aide la Coree du Nord a echapper aux sanctions americaines.
Cette solide politique de sanctions au cours de la derniere annee de la presidence d’Obama s’est prolongee jusqu’au debut du mandat de son successeur. Trump l’a qualifiee de politique de « pression maximale », ce qui etait exact, et l’a maintenue en place les deux annees suivantes.
La politique a renforce le fait que les pays devaient decider s’ils voulaient faire des affaires avec les Etats-Unis ou la Coree du Nord, car ils ne pouvaient plus faire les deux. Plus de 20 pays ont rompu leurs relations diplomatiques ou commerciales avec la Coree du Nord. Et les Etats-Unis ont egalement sanctionne des entreprises, des particuliers et des banques chinois qui aidaient la Coree du Nord a se soustraire aux sanctions. Certains experts ont predit que Pekin augmenterait son soutien a Pyongyang, mais la Chine ne voulait pas perdre son acces au systeme financier americain et a mis en ouvre les sanctions nord-coreennes en restreignant severement le trafic transfrontalier.
Ce n’est pas une coincidence si Kim a ensuite accepte des sommets avec Trump en 2018 et 2019. Trump a fini par s’eloigner de la table apres avoir realise que Kim n’etait pas serieux au sujet de la denuclearisation. Pourtant, au lieu d’augmenter la pression sur la Coree du Nord, Trump s’est tourne vers d’autres problemes pour le reste de son mandat.
Le deplacement de l’attention americaine ailleurs a garde les choses relativement calmes sur la peninsule coreenne. Plutot que de provoquer Seoul et Washington avec des lancements de missiles, Pyongyang s’est concentre sur la modernisation discrete de son arsenal.
Biden a egalement donne la priorite a d’autres choses, notamment les pourparlers nucleaires avec l’Iran et la reponse a l’invasion russe de l’Ukraine. Naturellement, la Maison Blanche n’avait aucun interet pour des problemes supplementaires. Mais ignorer Kim n’a fonctionne que jusqu’a ce que Kim decide de creer des problemes.
Il est vrai que les sanctions n’ont pas empeche la Coree du Nord de devenir nucleaire. Pourtant, Washington a constamment interrompu son programme de sanctions pour poursuivre des negociations infructueuses. Il n’a jamais eu la patience de maintenir les sanctions jusqu’a ce que Kim doive se plier, mais le schema suggere que les sanctions ont ete importantes pour au moins amener la Coree du Nord a la table des negociations.
Un programme de sanctions robuste aujourd’hui peut limiter les revenus du regime de Kim, l’obligeant a prendre des decisions difficiles entre la poursuite de son programme nucleaire, le maintien de la discipline militaire et la garantie de la loyaute des elites nord-coreennes.
Au cours des pres de 30 ans qui se sont ecoules depuis que Clinton a tente pour la premiere fois de limiter le programme nucleaire de Pyongyang, Washington a tente la meme approche ratee, esperant un resultat different a chaque fois. Si Biden veut vraiment essayer quelque chose de different, il devrait donner une chance a une politique de sanctions robuste de fonctionner.
Anthony Ruggiero est directeur principal du programme de non-proliferation et de biodefense a la Fondation pour la defense des democraties. Il a precedemment siege au Conseil de securite nationale sous le president Donald Trump en tant que directeur principal de la contre-proliferation et de la biodefense et directeur pour la Coree du Nord.